Le bailleur d’un local commercial a-t-il l’obligation de fournir un point d’eau potable ?
Le Code de commerce ne définit pas les obligations des parties (preneur et bailleur) quant à l’exécution du contrat. Le contrat de bail commercial est donc soumis au droit commun (art.1714 et suivants du Code Civil).
L’article 1719 du Code Civil dispose que le bailleur "est obligé, sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière de … entretenir [la chose louée] en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée". Ces obligations sont développées dans les articles 1720 à 1727 du Code Civil.
Le bailleur est notamment tenu à une « obligation de délivrance » qui consiste à remettre au preneur la disposition de la chose louée dans tous ses éléments, y compris l’accès à la chose et à ses accessoires (ex. : cave pour accéder à la chaudière, dysfonctionnement d’une climatisation dans un commerce de boucherie situé dans le Sud de la France) et de livrer des biens conformes à l’usage auquel ils sont destinés. Manque notamment à son obligation de délivrance le bailleur qui délivre des locaux dans lequel des inondations sont intervenues en raison du diamètre insuffisant des descentes d’eaux pluviales et des chéneaux.
Les règles applicables aux baux d'habitation et imposant au bailleur de délivrer un logement décent à son locataire doivent s'appliquer dans un bail exclusivement commercial, dès lors qu'elles concernent la situation effective du locataire. Ainsi, si le locataire utilise effectivement une partie des biens à usage d'habitation principale, cette circonstance suffit à rendre les règles relatives à la délivrance d'un logement décent obligatoires pour le bailleur de locaux commerciaux (Cass. 3e civ., 14 oct. 2009).
L’article 6 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 dispose que "le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation".
Le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 précise les caractéristiques de la notion de "logement décent".
L’article 3 de ce décret prévoit ainsi que : "Le logement comporte les éléments d’équipement et de confort suivants : …
2. Une installation d’alimentation en eau potable assurant à l’intérieur du logement la distribution avec une pression et un débit suffisants pour l’utilisation normale de ses locataires
3. Des installations d’évacuation des eaux ménagères et des eaux vannes empêchant le refoulement des odeurs et des effluents munies de siphon".
Par conséquent, en fonction du type de commerce exercé et de l’utilisation réelle du local commercial, l’alimentation en eau potable -et, partant, l’assainissement- seront obligatoires.
Il convient de rappeler que, lorsque le commerçant a des employés, le Code du travail oblige l’employeur à mettre à la disposition des salariés "les moyens d’assurer leur propreté individuelle, notamment des vestiaires, lavabos, cabinets d’aisances et, le cas échéant, des douches" (art.R.4228-1 ; Sur les lavabos et douches : art.R.4228-7 à R.4228-9 ; Sur les cabinets d’aisance : art.R.4228-10 à R.4228-15).
Le bailleur d’un local commercial a donc in fine l’obligation de fournir au moins un point d’eau potable et un WC. Si ce n’est pas le cas au moment de la délivrance de la chose, le preneur pourra contraindre le bailleur à réaliser les travaux ou les réaliser lui-même et demander des dommages et intérêts au bailleur sur le fondement de son manquement à l’obligation de délivrance.